Hugh Roberts will be touring Algerian libraries from 17 to 27 August to present, discuss and sign his collection of essays "Algerie-Kabylie" published by Barzakh editions in 2014. All his articles were written between 1994 and 2010. They are still so relevant.
Want to know what this collection contains and argues for ? Read a review here in French on TSA:
Un rendez-vous à ne pas manquer cette semaine sera avec le politologue britannique Hugh Roberts programmé notamment à la librairie Cheikh de Tizi Ouzou le 17 août, pour présenter et débattre de son livre Algérie-Kabylie (Barzakh, 2014). D’autres rencontres littéraires avec l’auteur auront également lieu à Tazmalt, Sidi Aïch, Akbou, Aïn El Hammam, Bouzeguene, Béjaïa et Boudjimaa.
Associate Professor d’Histoire de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient depuis 2012 à l’université de Tufts aux USA, Hugh Roberts a concentré ses recherches sur l’Algérie depuis sa première visite en 1972. Inscrit en thèse de doctorat à Oxford pour étudier en particulier la révolution agraire, Roberts réalise grâce à des rencontres fortuites avec des habitants de Ath Waaban en 1975, qu’un champ de recherche bien plus fascinant s’ouvre à lui : la structure politique de la Kabylie.
Quarante ans plus tard, il continue à étudier, à écrire, et à intervenir sur l’Algérie et la Kabylie en particulier.
En attendant ses trois nouveaux ouvrages en préparation The Green Card : the political dynamics of Islamism in North African and Beyond (Hurst), Commanding Disorder : informal politics and military power in Algeria et Algerian Politics and the Kabyle Question (IB Tauris), son livre Algérie-Kabylie vient s’ajouter à sa liste de publications en langue française.
Algérie-Kabylie est une collection d’essais et d’interventions de l’auteur entre 1994 et 2010. L’ouvrage est divisé en deux parties. Une première appelée « études », qui réunit quatre critiques pour la plupart parues dans la revue algérienne Insaniyat entre 1998 et 2003, dont deux comptes rendus d’ouvrages académiques : La guerre civile en Algérie – 1990-1998 de Luis Martinez (1998) et L’islam Kabyle. Religion, état et société en Algérie de Kamel Chachoua (2001). La deuxième appelée « interventions » regroupe un hommage à l’anthropologue politique algérien Mahfoud Bennoune, et cinq entretiens et communications de l’auteur donnés entre 2001 et 2007, ainsi qu’une partie de son rapport pour l’International Crisis Group, sur ses sujets de prédilection : la structure du champ politique de l’Algérie et de la Kabylie.
Toutes les analyses de cet ouvrage, même si elles ont été formulées il y a des années, sont encore singulières par leur actualité.
L’un des aspects les plus intéressants des travaux de Roberts, amplement illustré ici, est son raisonnement en termes de traditions politiques pour appréhender et comprendre l’organisation politique et sociale de l’Algérie.
Son observation et sa démonstration d’une « tradition du self-government communautaire de la société des campagnes algériennes » et sa mise en exergue de l’importance des « traditions de pensées et d’expression des lettrés et des non lettrés » sont des éléments caractéristiques de ses recherches.
Depuis ses premiers travaux, nés d’observations sur le terrain, Roberts décortique « les modèles appliqués en anthropologie politique pour observer et analyser le fonctionnement du système des campagnes algériennes ». Dans les articles réunis ici, il examine entre autres les thèses des deux grands sociologues Gellner et Bourdieu et leur influence sur l’analyse de l’histoire politique et sociale de l’Algérie faites par d’autres ensuite.
En faisant le constat des thèses de Gellner et Bourdieu sur l’organisation politique berbère, celle de la Kabylie en particulier, il démontre le réductionnisme de la sociologie structuraliste, et de la thèse segmentariste.
Roberts revient également sur les routes prises par d’autres spécialistes, comme au sujet de la jema‘a « où l’on a fait croire que c’est une tradition exclusivement kabyle, alors que c’est une tradition que l’on rencontre à travers le pays et même ailleurs », ou certains traitements de la question du « déni identitaire » qui ne prennent pas en compte « qu’il y a eu une évolution patente dans la pratique aussi bien que dans le discours de l’État algérien depuis vingt ans ».
La somme de ces articles constitue une longue réflexion sur deux éléments dominants des analyses d’observateurs, étrangers et algériens, de la structure et de la vie politique algérienne : le rôle des liens de parenté (la généalogie et les liens du sang) et les alliances. Ces aspects souvent présentés comme les deux éléments clés, garants de cohésion sociale et politique, ont intéressé et continuent d’informer les lectures des sociologues politiques et anthropologues qui s’intéressent à l’Algérie.
Ce que Roberts démontre et la thèse qu’il avance depuis les années 70 est que les liens de sangs et les alliances n’expliquent pas la cohésion politique et sociale en Algérie mais qu’il existe « d’autres principes pour garantir la cohésion que la parenté et l’alliance ». Pour Roberts, ces autres principes sont de nature politique, un facteur fondamental dans l’organisation sociale.
Le mouvement de l’opposition et « la faiblesse de l’aile civile de l’élite politique nationale », la crise démocratique en Algérie, l’opacité du système politique, et la question Kabyle, sont les autres grands thèmes en discussion dans cette collection. Des analyses offertes pour informer l’opinion internationale, et qui se veulent aussi « une contribution aux réflexions des acteurs algériens ».
Analyser la structure d’une société, en dégager les principes selon lesquels elle s’est formée et les structures sur lesquelles elle s’est construite n’est pas qu’un exercice intellectuel. Ce type d’analyses rigoureuses constitue un moyen raisonné de comprendre le cheminement d’une construction politique, et de permettre de « s’émanciper de sa mémoire » pour mieux construire.
Cette collection d’essais s’ouvre sur « les prémisses historiques d’une libération inachevée » et se termine sur la « philosophie des réformes » des années 20 à nos jours, et chez les précurseurs comme Ibnou Zakri, né en 1853. Une réflexion sur le mouvement réformiste algérien à méditer.
« Algérie-Kabylie » de Hugh Roberts, Barzakh, 2014, pp 331.